• "TEL-AVIV-BEYROUTH : CUBA EN ORIENT" par Jean-Marc DESANTI

    Ce qu'il y a de terrible dans les évidences c'est qu'elles s'avancent masquées.
    De quoi s'agit-il ? En apparence,  des incidents de frontière et de guérilla dégénèrent.
    En réalité une gigantesque partie d'échec menée par des joueurs de poker.
    Bis répétita,  nous assistons à la crise des missiles , version  Ahmadinejad , inspirée par Khrouchtchev.
    Le Liban est un objet de manipulation et d'intox pour l'Iran comme Cuba le fut pour l'URSS.
    Le Hezbollah, seule force organisée appuyée sur un réseau social que ses institutions (école , centre de santé , associations , relations diplomatiques) contribuent activement à alimenter, remplit le vide militaire et sécuritaire que la pseudo armée libanaise divisée ne peut combler.
    Le Hezbollah n'est en rien l'allié de l'Iran , mais son outil , sa milice privée .
    La disproportion est absolue, il faut se rappeler du fameux meeting de Bint-Jbeil où la milice regroupa 100 000 personnes dont le ministre iranien des affaires étrangères. En « soutenant » le Hezbollah, l'Iran renforce son potentiel contre Israël. Les missiles SOL-SOL Al FAJR 3 et 5 ( Téhéran - Beyrouth via Damas) reflètent non pas un intérêt prononcé pour un Liban libre mais une tentative de créer une dissuasion stratégique contre les attaques israéliennes qui viseraient l'Iran.
    De fait, si le cheikh Hassan Nasrallah tient des propos guerriers provocateurs, il devient mystérieusement muet sur les perspectives de paix à long terme, ce qui rappelle à l'évidence que la poursuite ou l'arrêt des opérations militaires sont liées aux orientations iranienne et à son allié syrien.
    Après le début de la guerre civile libanaise en 1975 et la perte de l'influence chrétienne, gage de stabilité, Israël s'est souvent fait piéger en intervenant en 1978, 1981, 1982, 1996 jusqu'en mai 2000 avec son retrait total abandonnant l'ALS ( Armée du Liban Sud- 3000 hommes à majorité chrétienne maronite), mais permettant à 7000 libanais de se réfugier en Galilée et d'y travailler ( coût pour Israël : 31 milliards de dollars par an).
    A chaque fois ce fut pour Tsahal « un pas en avant, deux pas en arrière ».
    Alors aujourd'hui... le pire est toujours possible..
    Mais le plus probable est qu'une fois de plus les autorités militaires vont faire croire au peuple israélien qu'il a remporté une éclatante victoire. Comme l'échec -ou le succès - d'une politique ne s'apprécie que par rapport aux objectifs, «  la crise des missiles »  se traduira par un échec.
    Le Hezbollah que Tsahal veut chasser et l'Iran maintenir se trouvera réduit, effrité, moribond, quasi-inexistant mais consolidé comme force de résistance dans l'esprit de libanais de toutes origines...
    En contraignant les israélien à se réengager au Liban, l'Iran les a amenés a devenir médiatiquement les agresseurs.  Le Liban qui venait de sortir de l'occupation syrienne et qui commençait à pouvoir réduire l'influence iranienne du Hezbollah va se retrouver en position de faible, en position de demandeur et     rejoindra tôt ou tard le bloc islamique...
    Non sans raison  Ahmadinejad pourra proclamer avoir regagné le Liban fusse sous les décombres         « sans un seul coup de feu ».
    Par ces manœuvres,  l'Iran parvient à désintégrer le camp occidental : aucune position politique et militaire d'envergure; seul,  un accord sur les couloirs de sécurité pour évacuer des populations misérables.
    Mais il y a pire. Les tenants du complexe militaro-industriel américano-israélien pourront continuer leur justification de conserver en l'état ce grand porte-avion américain qu'est Israël : « vous voyez bien que nos bombes sont utiles puisque nos tonnes d'explosifs... explosent »
    De très nombreux patriotes sionistes ( ceux qui n'ont jamais oublié le tire au canon sur leur bateau l'Altalena) comprennent  que l'état US ne fait que défendre au Moyen-orient des parts de marché dans le jeu du monopoly mondial.
    Les U.S.A comme leurs prédécesseurs britanniques ne connaissent que les lois du profit et se fichent des Tables de la Loi.
    Israël doit se sortir du double piège américano-iranien, il doit en tirer les conséquences.
    La seule bonne politique est la politique de sa géographie.
    Aujourd'hui, la base de la coexistence est le positionnement économique et éthique, le rapport entre économie globale et économie régionale, c'est-à-dire l'intérêt des peuples israélien, palestinien et libanais à un développement « écologique »  harmonieux par une coopération économique profitable parce que mutuellement équitable.
    Pour cela il est indispensable d'admettre une fois pour toute que les U.S.A sont loin, très loin et que la France et l'Europe sont proches.
    Israël est la clé de dialogue de civilisation à civilisation de part et d'autre de la Méditerranée et du Bosphore.
    Israël c'est l'Europe en Orient.
    Laissons les américains se perdre, plaignons leurs soldats latinos qui meurent pour rien, ou plutôt pour le capitalisme sauvage, les pétroliers cyniques, les roitelets corrompus.
    Mais alors, nous Français, soyons là auprès des Libanais !
    Nous avons toujours à régler leur compte aux terroristes qui ont assassiné  le 23 octobre 1983 nos 58 parachutistes venus pour préserver la paix.
    Notre civilisation européenne est une civilisation pagano-judéo-arabe qui lève le voile sur ce que Péguy prévoyait: «  la lutte mortelle entre le monde de l'argent d'une totale et absolue matérialité et tous les autres mondes ensembles (  le monde des philosophies et le monde des religions) qui sont de quelque spiritualité et dont les sorts sont liés, les fortunes conjointes »

    La conscience des prophètes comme celle des philosophes en appelle à notre désir de vivre.


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