• « Quand Sarkozy enterre de Gaulle » par Jean-François Lisée

     

    C'était plus fort que lui. Il ne pouvait pas se taire. C'est en répondant à un journaliste et en affirmant son amitié constante envers le Canada que le président français a affirmé que, "franchement, s'il y a quelqu'un qui vient me dire que le monde aujourd'hui a besoin d'une division supplémentaire, c'est qu'on n'a pas la même lecture du monde". Une division supplémentaire, donc l'indépendance du Québec. Lâchant le morceau, se libérant du carcan diplomatique que lui avaient imposé ses conseillers et son aile gaulliste, il a précisé que la France "est un pays qui rassemble et non pas qui divise". Avant d'ajouter : "Je ne dois pas être le seul à penser ce que je viens de vous dire."

    Pourquoi faire ce commentaire ? Le gouvernement québécois du libéral Jean Charest, seul habilité à déclencher un référendum, est procanadien et en début de mandat. La question de l'indépendance n'est donc pas d'actualité. Malgré les agitations de son entourage, visiblement embarrassé par la controverse, et le tact de la chef des indépendantistes, l'ex-vice-premier ministre, Pauline Marois, qui a voulu lui donner le bénéfice du doute, le président est en colère. En colère contre la presse québécoise plutôt que contre son propre écart, nous rapporte-t-on. Il aurait pourtant pu clore le débat en affirmant lui-même, avant de quitter le sol québécois, avoir été mal compris. Il aurait fallu qu'il jette du lest en reprenant la formule de ses prédécesseurs voulant qu'évidemment, la France accompagnerait le Québec dans ses choix.

    A la décharge de ses conseillers, il faut dire qu'il n'était nullement question que le président aille aussi loin. Dans le texte qui lui avait été savamment préparé par Henri Guaino pour son allocution devant l'Assemblée nationale québécoise, il allait multiplier les déclarations d'amour pour le Québec, affirmant la nature "fraternelle" des rapports entre les peuples français et québécois, plus liants donc que la nature "amicale" de la relation franco-canadienne. La formule satisfaisait à l'avance les indépendantistes, qui savaient qu'on atteignait probablement avec cette riche nuance la limite de ce qu'ils pouvaient espérer.

     

    http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/10/24/quand-sarkozy-enterre-de-gaulle-par-jean-francois-lisee_1110721_3232.html


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires

    Vous devez être connecté pour commenter