• ARTPRESS 354 - MARS 2009

     

    Deux textes inédits de Barthes viennent de paraître : chez Bourgois, les notes de son voyage dans la Chine de Mao effectué en 1974 en compagnie de Philippe Sollers, Julia Kristeva, Marcelin Pleynet et François Wahl ; aux éditions du Seuil, le journal de deuil que Barthes rédigea après la mort de sa mère (compte rendu dans ce numéro de Fabrice Hadjadj). Une fois de plus, François Wahl, ancien responsable des sciences humaines au Seuil et qui fut l'éditeur de Barthes crie à la trahison (il fut déjà à l'origine d'un procès contre le responsable de la revue la Règle du jeu, Bernard-Henri Lévy, qui avait publié des extraits d'un cours de Barthes). Ses raisons ? Barthes aurait refusé la publication de ces deux textes qui n'avaient pu être réécrits par lui et « violent l'intimité de sa vie privée » (oubliant, comme le lui rappelle Éric Marty, responsable au Seuil de la publication des œuvres de Barthes, qu'il avait lui-même, François Wahl, publié en 1987, après la mort de Barthes, Soirées de Paris, un texte qui violait autrement plus gravement « l'intimité de la vie privée » de son « Roland », puisqu'il y était notamment question des errances de celui-ci dans les boîtes homos de la capitale). Du point de vue juridique, tout est dans l'ordre : l'exécuteur testamentaire de Roland Barthes est son demi-frère, Michel Salzedo, lequel a autorisé la publication des deux inédits. Du point de vue de la littérature et de la morale ? Ne serait-il pas raisonnable de s'en tenir à une position de principe élémentaire : tout ce qui a été écrit peut et (en prenant, dans certaines circonstances, les précautions voulues) doit être publié. Un auteur qui jette des mots sur un papier prend le risque, qu'il doit assumer, de les voir lus un jour. S'il craint de voir son intimité ainsi violée, il lui reste une solution simplissime : ne pas la coucher par écrit, la laisser enfouie au plus profond de lui-même.

     

    Jacques Henric

     

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